Location immobilière nue : impôt sur le revenu ou impôt sur les sociétés ?
-
Publié par Alexandre Frutoso le
- Droit des sociétés
Afin de prévenir d’un point de vue fiscal les avantages et inconvénients de la location d’appartements, plusieurs questions doivent être étudiées afin de conseiller la meilleure solution selon la situation patrimoniale du requérant et la fiscalité en vigueur.
En location nue, que les protagonistes exploitent en direct ou via une société civile, les revenus engendrés seront dans la catégorie des revenus fonciers avec ses avantages et ses inconvénients. Les personnes seront soumises au barème de l’impôt sur le revenu avec les prélèvements sociaux d’un taux de 17,2% alourdissant fortement la fiscalité[1].
Pour donner un exemple concret, lorsque vous louez votre appartement pour un montant de 500 euros par mois et que vous êtes soumis à la tranche des 41% à l’impôt sur le revenu, les loyers annuels sont de 6.000 euros. Par simplicité, nous utiliserons la possibilité d’user de l’abattement forfaitaire de 30% sur ces revenus sans déclaration particulières correspondant aux charges liées à votre appartement.
Cela nous donne un revenu imposable de 6.000 x 0,7% = 4.200 euros.
L’imposition de ce revenu se réalisera comme suit :
- Pour ce qui est de l’impôt sur le revenu : 4.200 x 41% = 1.722 euros
- Pour ce qui est des prélèvements sociaux : 4.200 x 17,2% = 722,40 euros.
L’administration viendra vous demander pour des revenus fonciers de 6.000 euros, la somme de 2.444,40 euros.
Il convient désormais de vous informer sur l’option de l’impôt sur les sociétés. Elle n’est pas forcément un mal dans le sens où son taux d’imposition est de 15% jusqu’à 38.120 euros de bénéfices suivi d’un taux de 28% jusqu’à 500.000 euros [2]. Cependant le contribuable subit une double imposition :
- En premier lieu, au titre de la société avec le taux mentionné ci-dessus cela les bénéfices de la société. On parle de bénéfice. Par conséquent, l’ensemble des charges et frais liés à l’exploitation de la location devra être déduite. Nous ne parlons pas non plus de la possibilité d’amortir le bien immobilier sur une durée de 20 ans pour diminuer drastiquement la fiscalité.
- Et en second lieu, au titre du barème de l’impôt sur le revenu. Une fois l’impôt sur les sociétés payé, il convient de se verser les bénéfices restants. Là encore, plusieurs possibilités avec un véritable salaire de gérant, des dividendes etc … De ce fait, lorsque le taux d’imposition du contribuable est déjà élevé – taux de 41% et 45% – une société à l’Impôt sur les Sociétés pourrait éviter une lourde imposition.
Pour diminuer ces impôts, il convient de s’attarder sur le taux de distribution des dividendes. Couplé au prélèvement forfaitaire unique (PFU) de 30% (12,8% d’Impôt sur le revenu et 17,2% de prélèvements sociaux), la société soumise à l’IS permet de diminuer considérablement les taux à l’IR trop importants. La base imposable en cas d’imposition au barème progressif étant égale à 60% du brut distribué, de laquelle il convient de déduire le cas échéant la fraction du CSG déductible de 6,8% l’option pour le barème progressif ne sera intéressante que si le taux marginal d’impôt sur le revenu n’excède pas 14% (soit un revenu imposable par part inférieure à 27 086 €).
Voici le tableau récapitulatif lorsque votre base d’imposition est de 100 et que nous sommes sur taxation « classique » à l’impôt sur le revenu et à l’impôt sur les sociétés :
IR | IS | ||||
---|---|---|---|---|---|
Taux | 41% | 45% | 15% | 25% | 28% |
Impôt sur le Revenu | 41% | 45% | 45% | 25% | 28% |
Prélèvements sociaux | 17,2% | 17,2% | 0 | 0 | 0 |
Net après impôt | 41,8% | 37,8% | 85% | 75% | 72% |
Distribution | 41,8% | 37,8% | 85% | 75% | 72% |
PFU 30% (IR+PS) | Sans Objet | 25,5% | 22,5% | 21,6% | |
Net perçu | 41,8% | 37,8% | 59,5% | 52,5% | 50,4% |
Petite parenthèse de la location en meublé et du statut du LMNP :
Il est envisageable de prévoir une location en meublé plutôt qu’en nu. Un attrait tout particulier a eu lieu durant ces dernières années pour la location en meublée et le statut du LMNP. Brièvement, la personne physique sera soumise à l’Impôt sur le revenu alors que la société devra impérativement être à l’Impôt sur les sociétés [3]. En effet, la location en meublée est désignée comme une activité commerciale, et, puisque la société civile qui réalise des revenus issus d’une activité commerciale pour plus de 10% de son chiffre d’affaire est obligatoirement soumise à l’Impôt sur les sociétés, les personnes n’auraient pas le choix.
De plus, le statut du Loueur Meublé non Professionnel permet d’obtenir des avantages fiscaux considérables. Les revenus seraient soumis à l’impôt sur le revenu avec la possibilité de déduire les charges (charges de copropriété, taxe foncière etc …), un amortissement sur 20 ans de l’immeuble acquis, du déficit foncier réduisant les revenus tirés de ladite location et enfin la possibilité d’user du régime des micro-BIC permettant une déduction forfaitaire de 50% ou 71% des revenus si certaines conditions sont respectées [4]. La grande majorité des personnes usant de l’application Airbnb use de cet outil qu’est le statut du LMNP.
[1] La loi de finance pour l’année 2019 instaure un droit de renonciation à l’option pour l’IS par les sociétés de personnes. Nous pouvons désormais renoncer à cette option, en principe irrévocable, sous les conditions suivantes : le renoncement est possible uniquement durant les 5 premiers exercices suivant celui au titre duquel l’option a été exercée, il doit être notifié à l’administration avant la fin du mois précédant la date limite de versement du premier acompte d’IS de l’exercice au titre duquel s’applique la renonciation, le renoncement est définitif pour cette société.
[2] Évolutif au fur et à mesure des années pour normalement atteindre en 2022 un taux de 25%.
[3] Notons que l’utilisation d’une SARL de famille est envisageable et pourra nonobstant la location en meublée être transparente fiscalement tout en usant du statut singulier du LMNP. Cela dit, cette opération peut être dangereuse en cas de manquement aux obligations liées à la SARL de famille qui basculera vers l’impôt sur les sociétés. Financièrement cela pourrait être très dangereux.
[4] Voir les conditions et obligations sur le site du BOFIP (BOI-BIC-DECLA-20-20180601.